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L’agro-écologie en Guyane, développer une pratique respectueuse de la tradition et de la Nature

4. Savoirs de la Forêt, 8. Nos Actions| Views: 808

Après une première rencontre en juin 2018 à Saint-Georges de l’Oyapock, NatureRights, dans le cadre du programme Réseau des Savoirs de la Forêt, a coordonné une nouvelle session d’atelier sur le thème de l’agro-écologie. Cette fois, c’est dans le village de Franck Nenesse et Samuel Gunther, à Bellevue, dans la commune d’Iracoubo qu’a eu lieu cette rencontre.  

Le Réseau des Savoirs de la Forêt (RSF) est une initiative portée par l’association Nature Rights ainsi que plusieurs porteurs de projets et associations guyanaises. Le RSF a pour but de mettre en lien les dynamiques et les projets de valorisation des savoirs et savoir-faire des communautés de Guyane et de préservation du patrimoine naturel. Ces échanges viennent renforcer leurs connaissances et permet la diffusion de nouvelles compétences sur le territoire.Le RSF accompagne également le montage et la structuration de projets locaux, et propose des pistes de valorisation économique en Guyane et en Métropole.

Discours d’ouverture de Cécile Kouyouri

Au cœur de l’organisation de cette rencontre, l’association du village amérindien de Bellevue, Nono’l Dupo Wa. Depuis qu’ils ont créé le marché local du village en juin 2017, les membres de Nono’l Dupo Wa s’emploient à valoriser des pratiques d’agroforesterie auprès de la communauté.
Pour la cheffe coutumière du village, Cécile Kouyouri, qui a porté la demande de Concession Collective et de ZDUC (Zone de Droit d’Usage Coutumier) qui vient tout juste d’être accordée par la préfecture (décembre 2018) aux habitants de Bellevue, cela s’inscrit dans la dynamique de valorisation de l’agriculture traditionnelle, de l’artisanat du village et de la culture Kali’na.

Un temps d’échanges de savoir faire et d’expériences

Présentation de l’association Nono’l Dupowa par Franck Nenesse

Ils plantent le manioc et travaillent le couac, d’autres accompagnent les projets agricoles ou réalisent des études pour les institutions locales… Les temps de discussion sont riches et permettent à chacun de faire part de son expérience.

De nombreux participants racontent les problèmes surmontés pour faire face à la difficulté d’accéder aux terres agricoles. C’est notamment le cas pour les associations agricoles Wacapou (St-Georges de l’Oyapock) et Waseutne (Macouria) de la communauté Palikur. Les communautés qui pratiquent une agriculture traditionnelle, ne rentrent pas dans les critères de l’agriculture classique conventionnelle. Sur ce point, le travail mené par Mme Kouyouri et la communauté de Bellevue pour l’obtention de la concession collective est un bel exemple de succès qui encouragent les agriculteurs de St-Georges et de Macouria dans leur démarche. 

Le statut d’agriculteur n’est pas adapté à la réalité de terrain des agriculteurs amérindiens ce qui fait que peu d’entre eux sont déclarés. Ils sont donc dans l’incapacité d’accéder aux aides agricoles, mais également de vendre de manière régulière sur les marchés ou auprès de commerçants. La structuration de leur activité sous forme associative facilite certaines démarches (foncier, subventions), mais reste limitante pour le développement d’une filière économique. L’adaptation du statut d’agriculteur aux spécificités de la Guyane, ainsi que la constitution en coopérative agricole serait une grande avancée pour ces agriculteurs.
Très investi dans la diffusion des pratiques d’agro-écologie, Franck Nenesse a fait part de sa volonté de créer une “identité agricole” propre aux productions traditionnelles respectueuses de l’environnement. L’idée d’un label agricole “Savoirs de la Forêt” a été proposé. D’autres agriculteurs se sont lancés dans les démarches pour obtenir la certification “bio” pour l’année 2020. L’idée est claire : qualité et tradition sont au cœur de leur projet.

 

Visite de l’abatti de Samuel Gunther


Un temps d’immersion avec la visite des abattis


Samuel Gunther fait visiter sa parcelle qu’il exploite depuis 2018 sur la zone de concession collective du village. Aux côtés des cultures traditionnelles du manioc, de l’igname et de la patate douce on découvre sur son hectare des plantations de gingembre, de haricots, de piments, d’oseille péyi, d’épinards sauvage, ou encore de maïs. Samuel est un fervent défenseur de l’agriculture traditionnelle, respectueuse de la nature. Il est donc fermement opposé à l’utilisation de pesticides et d’engrais chimiques. Lors de la visite, il fait également part aux participants de sa volonté d’impliquer et de motiver les jeunes générations à poursuivre sur ce modèle d’agriculture.

Sur l’abatti de Franck Nenesse, situé sur la piste de Rococoua à proximité du village, Franck et sa femme Barbara appliquent les principes de “l’agro-foresterie” depuis 2014. Ce modèle agricole s’inspire directement de l’écosystème de la forêt amazonienne, où toute la matière organique en décomposition vient enrichir le sol et apporte donc des nutriments en quantités pour les espèces végétales qui la composent. Afin d’enrichir naturellement le sol, ils pratiquent le « paillage »  ou associent à leur culture des plantes de couvertures.  

Visite de l’abatti de Franck Nenesse

D’autres techniques sont également utilisées :
 L’inga, ou pois-sucré, est un arbre utilisé en agroforesterie pour sa capacité à fixer l’azote présent dans l’air, et le restituer au sol.
Des bacs de vermis-compostage sont également utilisés afin de récupérer les déjections des vers de terre extrêmement riche en nutriments.
Un poulailler abritant une dizaine de poules vient fournir la parcelle en fertilisant naturel (le fameux caca-poule).

 

La visite de l’abatti de Franck Nenesse a donné lieu à de nombreuses réflexions chez les visiteurs, qui, pour la plupart, découvraient un nouveau mode d’agriculture. Au sein du Réseau des Savoirs de la Forêt, ces échanges renforcent la création et la structuration des bonnes pratiques et la réappropriation par les acteurs de terrain de savoir faire ancestraux, reflet de l’identité du territoire.             

                                  

Pour retrouver le compte-rendu complet et toutes les photos de la rencontre, télécharger le  PDF ici

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